Marie-Chantal AZEMA née SCOTTI
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En Octobre 2007, alors membre de l’Association « La Grande Famille de Procida & Ischia » et à la recherche de mon arrière-grand-mère Agata ORTOPEDICO épouse SCOTTI, M. Pascal SCOTTO DI VETTIMO, Président de l’Association, me fait part d’un article de M. MATHIOT relatant la vie d’un Italien émigré en Algérie en 1880 qui s’avère être mon arrière-grand-père Giuseppe SCOTTI né à Campagnano le 28 mars 1846 sur l’Ile d’Ischia. Une photo illustrait cet article. J’étais abasourdie : il a fallu que j’attende ma 50ème année pour enfin voir le portrait de mes ancêtres et connaître leur histoire.

En effet, cela fait de nombreuses années que je suis à la recherche des mes origines. Rien n’était gagné d’avance pour moi. Je suis née sous X, le 8 avril 1957 à l’Hôpital de Mustapha à Alger. Heureusement pour moi ma mère, Mireille SCOTTI née le 17 décembre 1921 à Philippeville m’a reconnue le 20 octobre 1960, mais ne m’a jamais élevée. J’ai été placée dans diverses familles, comme les GASSO, rue N à Alger-Plage, mais c’était un couple de personnes âgées, originaires du Nord de la France et venue en Algérie en 1947, qui m’ont ramenée en France. N’ayant pas de papier d’identité, et ne retrouvant pas les traces de ma mère, la DDASS a partagé mon prénom composé en NOM : MARIE et Prénom : Chantal née à Foix (Ariège), où je résidais. Mes parents nourriciers m’ont expliqué que tout cela était nécessaire, pour obtenir le statut de Pupille de l’Etat et qu’ils puissent percevoir une pension pour m’élever. Le choc a été terrible pour moi et ni mes pleurs ni mes contestations n’y ont fait. Surtout que mon père nourricier, ancien agent de police, à Alger venait de recevoir de la mairie algéroise le 16 décembre 1968 mon acte de naissance avec comme mention marginale que j’avais été reconnue par ma mère. Il a fallu que j’attende ma majorité et mon mariage pour que j’arrive à retrouver mon vrai nom. Entre temps, j’ai du prouver ma nationalité française et suite aux recherches faites par le tribunal de grande instance de Toulouse il a était établi que ma mère, née à Philippeville était bien française de naissance donc je l’étais aussi, et ensuite du fait que la famille de mon futur époux était française je ne perdais pas ma nationalité. C’était en 1977 et cela m’a coûté 34,50 francs !

En 1999, j’ai retrouvé les traces de ma mère et de sa demi-sœur. Mais les choses ne se sont pas passées comme je l’aurais voulu : en effet ma mère n’avait jamais parlé de moi : étant l’enfant de la honte, comme elle disait, à la maison de retraite où elle s'était installée depuis de nombreuses années, avec son 3ème mari dont elle était veuve. Elle se rappelait que de ma demi-sœur, Marie-Emilienne, qui a refusé l’entrevue que je lui demandais parce que son passé, avec sa mère, la faisait, encore, trop souffrir. Ma tante m’a dit que j’étais issue d’une mauvaise rencontre qu’avait eu Mireille et rien de plus. Elle connaissait ses origines italiennes, du sud de l’Italie, mais pas dans le détail. Son père, François SCOTTI est bien né à Philippeville, veuf de ma grand-mère (Marie ROIG originaire de Denia (Alicante) avec qui il a eu ma mère et mon oncle Jean. Au décès de sa femme, il se remarie avec Carmen DI MEGLIO, et ont une fille (ma tante), et s’installent à Alger avec Mireille et son frère Jean. Carmen décède, elle aussi, les enfants sont confiés à un institut religieux. Ma mère est décédée en 2002 à l’âge de 81 ans. Je n’ai jamais su qui était exactement mon père, ni ma demi-sœur. Ma tante a eu de gros problèmes de familles et je n’ai plus osé la déranger avec mes soucis qui paraissaient bien anodins par rapport aux siens.

J’ai toujours essayé de retrouver des cousins éventuels. Je me suis inscrite à diverses associations de généalogie. Par les conseils d’une personne qui connaissait « La Grande Famille de Procida & Ischia » j’ai pu retrouver mon cousin et d’un seul coup tout mon passé s’est dévoilé.

Voici l’article de Michel MATHIOT. Notre arrière-grand-père Giuseppe SCOTTI est donc né à Campagnano. Il est issu d’une famille de paysans implantée dans l’île d’Ischia depuis au moins 1700 si on en croit l’acte de mariage de Nicola SCOTTI et Porzia SCHIANO mariés à Procida en 1675. A l’âge de 18 ans, en 1864, Giuseppe s’engage dans la marine marchande en tant que mousse. Il gravira petit à petit les échelons pour devenir marin. Il se marie à Ischia le 23 mai 1872 avec Agata, cuisinière, née à Naples de parents inconnus le 1er décembre 1850 (d’après l’acte de décès et de mariage, 1852 d’après d’autres papiers sur le dossier de naturalisation) abandonnée à la naissance sur les marches de l’église de l’Annunziata. Elle sera enregistrée sous la lettre O et le numéro 1824. D’abord recueillie par les sœurs elle a été élevée par Luisa et Antonio MAZZELLA, peut-être les parents de la mère de Giuseppe qui s’appelait Carmela MAZZELLA. En 1876, après une période de 12 années, passées sur les bateaux, Giuseppe, devient cultivateur, tout comme son père Vincenzo. Il est fort probable qu’il devait être vigneron. A l’époque, une maladie frappant la vigne, en Italie, avait causé une grande misère et provoqué une émigration massive vers les Amériques et l’Algérie.

  Giuseppe SCOTTI arrive en Algérie à Philippeville, en 1880 avec l’un des frères (Michele) de 10 ans son aîné, sa femme Agata et son fils Michele. Ils habitent la rue du 3ème Bataillon d’Afrique. En 1885, sur les coteaux du Beni-Melek, Giuseppe loue pour quinze cent francs une parcelle de 2 ha de vignes avec quelques arbres fruitiers à M. Joseph AUMERAN pour une durée de 5 ans.
Dans l’ouvrage « l’Algérie et ses vins » de 1892, l’exploitation de Michele et Giuseppe (ils devaient travailler ensemble) y figure parmi les 34 principaux propriétaires avec une production de 300 à 350 hl. En 1891, il est propriétaire et loue une autre parcelle pour 1800 francs par ans à M. Pierre MUSCAT. Agata et Giuseppe demandent la nationalité française en 1893 (et moi, 84 ans, après il a fallu que je prouve la mienne !). En 1895, il loue pour 200 francs une autre parcelle à M. Paul CATHERINEAU. La production du vin blanc ou rouge du Beni-Melek avait reçu la médaille d’argent à Anvers en 1894 et une médaille d’argent au concours agricole de Philippeville en 1895 et 1901, et choisi par le curé de Philippeville, il faisait un excellent vin de messe, disait-on !  


Giuseppe et Agata ont eu 6 enfants :

  • Vincent né le 17 mai 1873 à Ischia et décédé en bas âge à Ischia, d’après les relevés demandés par Michel MATHIOT au Père Camillo D'AMBRA.

  • Michele né le 8 janvier 1879 à Ischia qui a d’abord été employé de commerce et qui a fondé en 1905 l’entreprise de transports Michel et Vincent SCOTTO (son frère) qui deviendra et jusqu’à l’indépendance la maison SCOTTO ET MONEGLIA. Il épousa en 1905 Elvire QUIRICI avec laquelle il eut 4 filles dont la mère de Michel : Marthe SCOTTI épouse MATHIOT. Le nom de SCOTTO qui apparaît ici n’est pas une erreur. En effet les enfants de Giuseppe et Agata nés en Algérie ont vu leur nom de SCOTTI se transformer en SCOTTO, au moment de la déclaration de naissance suite à une faute d’orthographe commise par l’officier de l’Etat-Civil. Dans le dossier de naturalisation, en ma possession, un « acte de notoriété publique » daté de 1893 stipule cet état de fait.

Vincent né à Philippeville et mort pour la France le 8 juin 1918 alors qu’il était adjudant au 4ème régiment de tirailleurs.

Jean né le 10 avril 1884 à Philippeville, prêtre lazariste en 1909, il exercera son sacerdoce en Italie et au Moyen Orient. Il laissera les ordres pour épouser Germaine la veuve de son frère Vincent, mort à la guerre en 1918, qui laissa un fils.

Albert né le 3 juin 1887 à Philippeville.

Et le dernier, mon grand-père : François SCOTTI le 25 mai 1894 à Philippeville, marié à Philippeville avec Marie ROIG le 10 novembre 1914, puis veuf, remarié avec Carmen DI MEGLIO le 25 mars 1930, décédé à Toulon le 30 novembre 1980. Il a été boutiquier à Philippeville avant de partir à Alger, où il ouvrit un magasin de journaux. Il a été comptable vers 1948 puis représentant de commerce dans les années 1950.

Giuseppe est décédé tragiquement le 4 juillet 1918 en voulant sauver le produit de sa récolte. Réveillé dans la nuit par des bruits en provenance de sa cave. Le bouchon de la cuve avait sauté, ne voulant pas réveiller les siens il s’arc-boute de dos contre la cuve pour stopper la fuite. Il a supporté toute la nuit la pression du liquide sur son dos, sans rien dire. On le retrouva mort au petit matin. Son épouse ne lui survécut que 4 mois.

Voilà toute mon histoire enfin retrouvée. Je suis maintenant apaisée d’avoir pu reconstituer le puzzle de ma vie. Je ne saurai jamais qui a été mon père et je ne verrai jamais ma demi-sœur. Mais je me sens quand même soulagée de toutes ces démarches et j’espère que bientôt nous pourrons, avec mon cousin Michel, organiser une « cousinade » et revenir sur la terre de nos ancêtres, peut-être, en 2009 !

Je remercie infiniment M. SCOTTO DI VETTIMO et Michel MATHIOT pour leur aide.

Ma mère qui a fait ce qu’elle a pu, mais qui a eu ce geste merveilleux de me reconnaître et m’épargner l’incertitude et la souffrance des enfants nés sous X. Et, enfin, ma tante à qui je souhaite tout le réconfort et le bonheur possible.

Mérenvielle, le 30 avril 2008

M-Chantal AZEMA née SCOTTI


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